il Campiello

[Blandine]

Je reviens de Venise.



Et ces quelques mots disent les souvenirs qui surgissent, au hasard de la mémoire, des instants un peu particuliers comme, seule, Venise peut en donner.




Cannaregio. Je marche dans une lumière de peintre, je déjeune sur une fondamenta. Tout, près sur un bateau, des chansons italiennes s’échappent d’une radio.
Impressions de vivre, là, dans un accord parfait.
Deux jours après, tout près de là, on s’affaire tranquillement, il va pleuvoir et la vie suit son cours en gestes de toujours.



Pour Marie D qui aime photographier, les gens, dans Venise …


Fin de l’après midi, devant la Scuola Grande di San Marco. Je réchauffe mes mains sur une tasse de chocolat.
A la table voisine, on écoute des airs d’opéra. On se sourit en reconnaissant les œuvres, ah Donizetti … Oh, Il trovatore …
Devant, le soleil orange glisse le long de la façade, comme un grand rideau de théâtre qui referme le jour.
Les voix m’accompagnent, puis s’éteignent, quand je quitte le campo, vers la nuit vénitienne.

Dimanche, il pleut comme jamais je n’ai vu encore, il pleut continument, obstinément.
Malgré les trois épaisseurs de vêtements, malgré l’imperméable, je sens les manches de ma robe mouillée contre ma peau.
Et puis, il y a aqua alta.
Sur le vaporetto, trois américaines de Chicago s’inquiètent, à l’Accademia, de l’arrêt de la Ca’ d’Oro.
Next the Rialto, I say.
Alors, l’une d’elles me confie, avec un petit air dégouté : I don’t like this place : it’s too wet.
Ah, comme les américains savent le mot juste et comment dire mieux et davantage que ce petit mot là !


Mais comme on fait des rencontres dans les jours de soleil, on en fait aussi dans les jours de pluie, de celles qui réchauffent le cœur, quand on s’attarde, du capuccino au spritz, devant San Giacometto.
Je retrouve Claudie et Marie D.
Elles ont les mêmes mots que moi pour dire Venise : un autre monde.
Je fais un geste, en tendant la main, et puis je ne dis rien, parce que, oui, c’est ça et que l’on se comprend.





Castello. Il pleut. Tout luit d’une clarté un peu poignante. A Venise, la pluie étreint l’âme plus qu’ailleurs. Et à Castello, peut être davantage. Photos, sous le parapluie.
Je pousse la porte d’un très petit café. Capuccino.
Je savoure, dans la quiétude.
Des femmes entrent et puis ressortent : elles ont leurs habitudes. Elles causent, d’une voix un peu rauque, je distingue quelques mots : la piove, ça, je sais. Une femme survient, elle descend droit du tableau de Giorgionne, avec le rouge en plus qui déborde des lèvres.
Elle s’installe avec un soupir d’aise, et cul sec, elle avale la grappa qu’on vient de poser devant elle. Pas plus haut que le bord, mais le bord était haut. Il est trois heures dans Castello. Il pleut.


Pour Claudie qui aime Castello et même les jours de pluie...


Et puis, d’un seul coup, la pluie s’est arrêtée !

C’est le matin.

Venise s’offre avec la grâce d’un sourire qui revient.
Et je vais, dans la clarté opalescente de sa splendeur renouvelée.





Vers d'autres moments et d'autres rencontres ... que je dirai demain, pour rêver encore, ensemble ...

[Stef*]

Eh bien vivement demain... :D :D :D :D
Merci Blandine :wink:

[Zen]

hummmmm, encore !
a presto Blandine

[dominique M.]

ah! qu'il fait bon lire ce récit de bon matin, juste avant .... le boulot

[Véra da POZZO]

Superbe reportage impressionniste, merci Blandine.

Et..., c'est déjà demain.... :wink:

[Blandine]

Oui, c’est déjà demain, on perd le fil du temps quand on marche dans l’enchantement tranquille de cette Venise de lumière.
Je vais rejoindre Silvano, Claudie et Marie pour un moment de rencontre et de partage, un moment campielliste.
Venise est en moi et je suis dans Venise. Je tourne et je vire au hasard des calli, et là, je ne sais pas, un endroit de douceur, rien de particulier, mais quelque chose en plus, comme un surcroit de grâce.


Et la reconnaissance qui traverse le cœur que tout cela existe …


Venise est blonde et douce en cet après midi.
J’écoute et je découvre ce que les photographes vivent quand ils sont dans Venise.
Sous le vocabulaire et la technique, leur âme est là qui s’imprègne des lieux. C’est un plaisir de les regarder faire.

Je dis venez, j’ai un endroit secret à vous faire voir. Fondamente de la Grue, il est encore insoupçonnable et je sais l’effet qu’il produit, quand on tourne … Ah, voilà, nous y sommes. J’aime ce qui leur échappe alors : aaaaaah, oui ! aaaaaaah, oui !!!

Je leur laisse les lieux et je m’appuie au mur, dans toute cette beauté.
Merci, Claudie pour ta photo.

Au pied du pont de l’Accademia. Un endroit touristique.
C’est bien aussi de regarder les gens qui regardent Venise. Les familles, les amis, les amants, ce qui vivent vraiment et ceux qui font semblant, tout ce ballet des yeux qui se croisent et des mains qui se touchent.

Et puis, tout s’affaire tout d’un coup, le cameraman, un journaliste, une personnalité, sans doute. On s’installe. La personnalité parle longuement devant la camera, avec les mains qui se lèvent pour convaincre et quelque chose, dans l’attitude qui respire une certitude tranquille avec ce rien d’arrogance qu’on ceux qui savent qu’ils sont connus …


Et vous, ceux qui suivent les actualités vénitiennes et italiennes, le reconnaissez-vous ?


C’est le soir et je suis épuisée. Une angoisse diffuse me pèse sur le cœur. Il fait froid.
Je rentre du restaurant où j’ai diné.
Dans un petit ramo, j’aperçois une vierge blanche qui baisse les yeux sur un fond bleu. Tiens, je ne l’ai pas celle ci et je n’ai pas mon appareil photo.
Bon, du courage, du courage, je retourne à l’hôtel, je prends mon apn, et je retrouve la petite patère.
A la sortie du ramo, un inconnu m’attend. Il me sourit de ses yeux bruns et me dit : I’m so happy to met you, bellezza ! Puis il me prend la main, qu’il pose sur son bras : I’m your Cavaliere and you are ma Dama, vieni.

Je viens. Et je m’en vais, légère, au bras de Cesare, dans la bella notte


Je marche avec Roberta dans la magnifique lumière de la San Martino. Elle me dit, dans ce français chantant qu’ont les italiens quand ils nous parlent.
« Blandine, tou ne dois pas prendre le plan avec toi. Tou dois te perdre dans Venise. »
« Roberta, je me perds dans Venise, je me perds dans Venise, et même avec le plan !!!! »
« Non, non, tou dois te perdre dans Venise, comme on se perd dans la vie. Et faire confiance. On se retrouve toujours. »

Et puis : « pourquoi tou aimes Venise ? »
Je tente d’expliquer ce que j’y vis ….
La pierre, l’eau et la lumière, c’est ce que j’aime. C’est une fascination.
Elle me répond :
« Oui, c’est que la pierre est permanente et l’eau est mouvante, mais juste ce qu’il faut »






Ainsi, je reviendrai me perdre dans Venise et pour me retrouver, dans la splendeur de ses pierres et dans la mouvance des ses eaux, pour éprouver, pour ressentir et pour comprendre, pour regarder les gens d’ici, les gens d’ailleurs, pour rencontrer et pour y vivre dans sa lumière.

[labeuquette]

[Christian il Veneto]

c'est beau c'est bon...merci Blandine.
voila comme j'aime Venise et suis totalement d'accord avec Roberta
oublier sa carte pendant des heures et se perdre se fondre
y perdre la tête et l'esprit........mais pas les yeux
voila ça ressemble bien à une drogue, non?
et là je suis en plein manque

et le Campiello m'aide à tenir....merci à tous

[Zen]

merci Blandine

[Stef*]

:D :D :D :D :D


Merci Blandine.
A demain ? :wink:

[monteverdi]

Nous espérons tous....... :wink: :wink:

[Blandine]

C'étaient des moments fugaces à vivre pleinement .... Et de très beaux cadeaux que Venise m'a fait!



Bon, je suis curieuse, personne n'a reconnu l'interviewé ????

[Macha]

Ah ! Merci Blandine !

Comme j'aime suivre tes déambulations dans Venise ! :D :D :D
Encore et encore !

[Blandine]

Le jour où mon américaine a dit que c'était "wet" ...

Je retrouve cette photo, alors que je fais du classement en vue de vous savez quoi

J'aurais voulu la poster à côté de celle que Claudie a faite de ce même pont un jour de grand soleil, mais je ne l'ai pas retrouvée :(

Enfin, il faisait humide dans Venise, ce jour là ....



:?

[Albert(o)]

je viens seulement de tout lire...
merci... encore...