il Campiello

[Blandine]

On les a dument chapitrées.

Et, elles se sont tenues bien sages, de vraies Nobles Dames, les deux petites filles.

Elles ont pris, avec grâce, l’air doux et grave de la Madone que l’on voit aux tableaux des autels.



Alors, quand Ser Longhi a dit « je pense que nous en avons terminé » et que dans un même mouvement, on s’est levé pour s’approcher du maestro, les deux mignonnes se sont regardées, et dans un grand envol de linon blanc, elles ont pris la fuite, dans la grande maison.




Dans quelques instants, la balia sera là, et s’en sera fini de la liberté de courir. Les petites jambes gainées de soie trottent menu. Elles se sont pris la main et vite, elles traversent le portego. Le soleil poudre la pièce, de l’or qui vole et qui scintille. Elles se sauvent vers la porte de droite, celle de la bibliothèque, il n’y aura personne, à cette heure.
















Là-haut, elles pourront s’attarder à leur aise, on ne les trouvera pas. Elles savent bien où elles veulent aller, mais, la chose est interdite, bien sur. Pourtant, elles l’ont déjà vue, la foret de rêve, celle où courent le léopard et le renard, celle où le petit singe vole sur un drap de turquoise et regarde les oiseaux. Ah, revoir tout cela, même s’il faut en pâtir rudement par la suite… Mais qu’importe, qu’importe, seule la curiosité et l’envie les tiennent tout entière à présent et elles rient de plaisir à l’avance, une main potelée sur la bouche. Chut, pas de bruit.



Derrière la porte close, la fête de ce soir se prépare. Il sera simple de se glisser, comme deux petits elfes, entre les valets qui transportent les lourds candélabres, la porcelaine et les cristaux. Dans ce grand remument, la balia ne saurait les apercevoir, elles vont courir vers le grand salon de musique et demander conseil à la belle dame du balcon. Elle saura leur dire, elle comment gagner le secret du Casin.
















La bonne fée tend une main languide vers son galant, mais elle se détourne bien vite vers les deux petites qui arrivent, un peu essoufflées, un peu échevelées. Elles lèvent vers la bonne fée un regard implorant : le Casin, nous voudrions revoir le petit singe. La belle dame à son balcon se penche avec bienveillance vers les deux enfants et leur chuchote : D’abord, il vous faudra vous envoler sur les nuages de Ser Longhi. L’aventure est périlleuse. Il faudra marcher sur les épaules des géants mais toutes les créatures du ciel vous aideront. Quand vous aurez salué d’un sourire les deux enfants couronnées, le plus difficile sera fait. Allez vite, je veillerai sur vous, avec les dieux et les déesses, les nymphes et les héros, prenez le grand char ailés qui parcourt le ciel : la foret et ses mystères sont là, juste au bout.

















Et les fillettes s’envolent vers la foret merveilleuse, elles marchent de leur pas léger sur les géants qui ne les voient pas tant elles sont menues … Seuls, les deux enfants couronnées de fleurs et de feuillages leur font signe car la foret des sortilèges et toute proche …














Elles chevauchent les nuages et soudain, l’air frais de la foret les accueille. Un petit animal fronce le nez et leur offre une noisette. Elles sont arrivées, elles le voient, le petit singe, il est là, tout près, il leur faudra prendre garde au renard …








Le petit singe vous attend au prochain épisode …

[Zen]

Quelles merveilles Blandine !

[dominique M.]

alors là, Blandine .... magique, c'est magique .... je ne sais pas vraiment quoi dire ....

euh, rappelle moi: tu es publiée chez quel éditeur?

[babeth]

cette visite scénarisée est un enchantement....

[Lili]

C'est magnifique Blandine ...
Merci!!!

[Zen]

[Jas]

Vite Blandine, renvoie moi ta clé avec ces trésor (je t'en dois déjà une)
Que je mette en ligne ce merveilleux petit conte

[Stef*]

[DANY]

C'est formidable!

[alain]

Merci pour ce beau moment !

[Veronique Franco]

Magnifique!

Oui, mais le Renard?...et le Singe?...et alors, et alors...???

[Blandine]

Les petites filles vont avoir encore à vivre bien des émotions ... Il y a aussi un guépard, oh, la, la ...

Mais ce soir, mon fils vient avec une amie pour demander des conseils ... sur Venise Tiens donc !!! Je ne sais pas combien de temps ils vont rester.

j'ai continué la rédactions de mon petit conte, mais il n'est pas encore fini. Peut être alors, juste un petit bout de plus. C'est un feuilleton

[Blandine]

Là haut vers le ciel rose et blanc, d’étranges oiseaux au plumage étincelant, prennent leur envol dans un froissement d’ailes pareil aux voix éthérées et mystérieuse qui s’échappent des grilles de la sala di musica.



Le renard les a vues. Il se détourne vers elle. Deux petits cœurs, sous la batiste, battent un peu plus fort.

Pourtant, le renard s’avance avec une nonchalance si gracieuse et si avenante que la rousseur brillante de son pelage leur donne tout soudain l’envie d’y plonger les mains et le visage. Le renard est bon prince, il se laisse faire volontiers. Le souvenir tendre d’un enfant aux cheveux de la couleur des blés lui reste au cœur. Voulez-vous m’apprivoiser ? Les petites filles ravies font oui de la tête, elles trouvent que, décidément, c’est un délice de le caresser, et qu’en sa compagnie, l’aventure sera plus belle.

Mais voici qu’au beau milieu de ces charmants ébats, un feulement profond roule et se répand depuis le fond de la forêt comme un orage d’été.



Deux yeux les fixent.

Ils ont l’éclat insoutenable des pierres froides que Mare, par exception, leur donne à voir, sur le velours de sa cassette. De saisissement, elles restent immobiles, la bouche entrouverte, le souffle court, elles en oublient les bonnes manières. Ne faut-il pas, au contraire, faire une révérence, devant le seigneur de ces lieux ? Avec son air altier, il est, à tout le moins, procurateur ! C’est peut être même le Doge ? Mais, quelle bête tu fais, il n’a pas de corno ! Alors, elles pincent avec deux doigts la mousseline de leur robe, et, parfaitement, les épaules et le dos bien droits, elles exécutent une révérence qui ne ferait pas rougir leur maître de dance. Même dans la forêt enchantée, elles restent deux Nobles Dames de Venise.



Le félin prend un air patelin : charmantes, elles sont charmantes, et si gourmées avec cela, comment pourrais-je avoir envie de croquer d’aussi jolies jeunes personnes? Mes belles amies, le feulement est chose de bon usage chez les grands fauves, c’est badinerie toute simple. Je peux tout aussi bien me coucher à vos pieds et ronronner jusqu’à la fin des jours si c’est là tout ce que vous souhaitez. Je peux célébrer vos grâces incomparables, votre teint, vos manières, votre esprit, enfin tout ce qu’il vous plaira d’entendre.
Partagées entre la crainte et le ravissement, les mignonnes pouffent de rire derrière leurs mains et rosissent quelque peu. Voila un fort grand malappris qu’il est bien doux d’entendre, il a raison, n'est-ce pas ?

La lionne surgit. Elle prend l’air formidable. Quels efforts faut-il donc fournir pour sauver ces petites sans cervelle, ne peut-elle s’empêcher de grommeler. Il ferait si bon s’étendre et ne penser à rien plutôt que d’accourir pour s’occuper de jeunes péronnelles qui seraient plus à leur place dans une salle d’étude à pencher leur minois sur un abécédaire. Voyez comme elles se pâment, vraiment, c’est à frémir !



Les voila toutes dépitées. Les lettres font des livres, certes, mais qu’est-il besoin de les apprendre, quand on peut rêver comme elles savent si bien le faire ? C’est une fort déplaisante personne, suivons le chat, il est soyeux et doux et voit l’œillade qu’il nous fait !




Quelle délicieuse invitation ! C’est sur, le chat connait le petit singe, on peut en être sur. Elles courent, vite, et voici qu’elles battent des mains, la joie dilate leur yeux, elles tendent les bras, il est là, il va les emporter.




Le petit singe – quelle grimace que son sourire – leur tend la main et les emporte. Il les emporte de draperie en draperie vers le oiseux de paradis, dans les ciels sans nuages des rêves enfantins.




Casting:

[babeth]

bon, puisque les deux petites si corsetées, si bien élevées, que leur rang force à faire des révérences guindées alors qu'elles veulent jouer au ballon en visant les lustres......ne se sont pas fait bouffer par la lionne.....il faut qu'elles et leur nurse aillent dormir, voici leur chambre qui resemble à une maternité volante !

http://www.metmuseum.org/collection/the-collection-online/search/189164?=&imgno=6&tabname=label

[Blandine]

Miséricorde, c'est merveilleux, j'en tombe de mon canapé !!!

Merci, babeth pour avoir indiqué cette chambre ahurissante et splendide. De quoi rêver encore. J'adore les angelots.

J'irai bien faire un tour à NY, histoire de compléter la visite

Les stucs que je vous ai présentés et qui proviennent de l'ancien Casino, sont également de la même date et des mêmes artistes.