Blandine

Inscrit le : 24 Fév 2008 Messages: 5948 Localisation : Rennes
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Posté le : Mar 25 Mars 2008, 08:59:30 Sujet du message: Coffret Venise |
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Coffret de trois livres: Venise et son histoire, Venise, art et architecture, Venise, un art de vivre.
Sous la direction d'Alain Vircondelet.
Extrait de l'introduction:
"D’où vient le désir de Venise ? Quelle est cette histoire secrète que la ville tisse, depuis des siècles, avec ceux qui la visitent, l’habitent et qu’elle force à revenir ? Prendre garde à ce désir, à ce besoin de Venise : il tient ceux qui s’y abandonnent. On pourrait les appeler ses captifs. D’où vient le charme, le sortilège ?
Les jours à Venise ne ressemblent à aucun autre, vécus dans la fluidité de sa topographie, dans cette étrange liberté qu’elle inspire quand ses ruelles et ses ponts semblent retenir, enserrer le visiteur, ne plus le lâcher. On entre dans Venise et tout s’absente ; le monde, les difficultés, les mille tracas de la vie moderne, ses aliénations, ses enfermements. Il y a des jours à Venise où tout se réconcilie et se retend, se retrouve et se donne. C’est que Venise renvoie au lieu originel, à ce sentiment profond, latent et lointain de l’appartenance ; elle est le creuset de civilisations perdues qui se sont comme rassemblées, ont appris à vivre ensemble et distribuent avec effusion leurs trésors, leurs dons d’âme . Les aubes et les crépuscules, l’art de la flânerie et de la promenade, la conversation et le silence, la rumeur des choses indicibles et la proximité d’un Beau inouï, la grâce et la tension, l’or et la nature, le doux e t le tendre, l’altier et le dérisoire, le rien et le trop, l’eau et le ciel, tout se donne dans une confusion extrême, en abondance, dans la joie comme dans la mélancolie.
On entre dans Venise et c’est comme si on entrait dans un connu de soi obscur et soudain reconnu. L’art d’y vivre soulève le cœur et les sentiments, les exalte et les affine. Quelque chose dans la ville, pourtant parvenue au paroxysme de l’art universel, se rend à l’intime, à la vérité profonde de chacun. Quelque chose d’infiniment esthétique qui renverrait à la nature la plus archaïque, à ce qu’elle a de plus humain et de plus juste.
Se sentir bien à Venise : dernier point du monde où, dans son escargotique configuration, la ville redonne aux hommes des chances de survie, c’est-à-dire des raisons et des moyens de continuer sa vie…
Il n’y a qu’à Venise que le chant des oiseaux, les pas des marcheurs, les bavardages des habitants, l’intensité du silence, les violons de chez Quadri, les sirènes mugissantes des bateaux de plaisance résonnent avec autant d’harmoniques, sans jamais se contrarier, dans une unité sans référence aucune dans l’histoire des villes.
C’est par là peut-être que Venise est unique : par son indicible secret qui fait se relier entre eux les choses et les êtres. A-t-on jamais vu un tel rassemblement de visiteurs venus du monde entier sans qu’aucun n’altère le paysage et l’esprit ne vienne troubler le mystère ?
Les sites les plus représentés sur les cartes postales restent des lieux du « jamais vu », d’un inconnu indéfinissable et cependant étrangement familier.
Se rendre tard dans la nuit aux Procuraties, au moment où les chaises et les tables des cafés mythiques sont empilées et enchaînées les unes aux autres, ou encore au bord des quais sur la Piazzetta, à la même heure. Entendre la rumeur sourde des flancs de gondoles qui se heurtent, celle de la vague qui vient doucement cogner contre la pierre, contempler l’immensité de la voûte céleste retenue dans le quadrilatère des bâtiments de la Piazza San Marco, et savoir qu’y veillent les plus purs chefs-d’œuvre du Quattrocento ...
Dans le monde égaré par la violence et le ressentiment, dans la lutte effrénée pour l’argent et la vanité, Venise reste imperturbable, à une distance suffisante pour ne pas prendre part au destin tragique de toutes les Babel. Elle reste elle-même, accepte certes quelques changements, quelques modernisations, mais résiste aux mouvements radicaux qu’inflige à tous le temps qui passe. Son art de vivre réside là, dans sa passivité apparente, dans son émerveillement, dans sa sagesse qui est d’enchanter le monde. Et par là même de le réunir." |
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