il Campiello

[Gérard]

Comme c'est admirable !
Quel magnifique document !
Pensez-donc , j'y retrouve ce Vivaldi que je savais d'instinct .
Un vrai créateur , un profond créateur , une force qui va sans cesse , un artiste puissant , incomparable , et non le portrait candide , mièvre et indigne qu'on nous en a pratiquement toujours fait .
C'est curieux de les sentir ainsi , ces immortels !
Il en fait à tout jamais partie , et ceci grâce à des documentaires de cette hauteur .
Merci à Fabio Biondi , à Patrick Barbier , à ce formidable conteur entremetteur qu'est Alain Duault , mais surtout à la présentatrice qui , d'un ton tout égal , sait nous faire sentir toute la palette d'une si grande personnalité . Pensez-donc , composer un opéra en 5 jours , Tito Magno , pour un mariage urgent qui n'eut jamais lieu , qui peut prétendre le réaliser ce tour de force ? John Williams , Michel Legrand , Maurice Jarre , Wladimir Cosma ? Peut-être .
Et les partitions de Turin , pas de ratures : 478 concerti sauvés sans griffures , c'est extraordinaire , j'en reviens pas ; faut avoir sacrément intégré l'oeuvre tutélaire au plus fort de soi-même pour rédiger des manuscrits pareils . Quel génie : mais bon , j'le savais !
Les pop-stars d'aujourd'hui sont richissimes et camées , nous envahissent indûment , composent des oeuvres plus que banales , ont des publics de pauvres et seront vite oubliées tout en périssant sous des océans de louanges florales et parfumées . Nullissimes , en fait ! Lui , c'était l'inverse parfait : il gagnait peu , de santé fragile et de vie saine , composa en vigueur permanente un fleuve de chefs-d'oeuvre puissants , pour un public de patriciens . Mais lui sera plus qu'immortel , bien qu'accompagné au glas solitaire des pauvres abandonnés . Vivaldissime , en fêtes !
Il a rejoint à la fois dans la même misère et dans l'incroyable grandeur les deux autres admirables qui me bouleversent sans cesse , Mozart et Beethoven , tous trois rassemblés dans le cimetière des pauvres à Vienne , l'autre capitale de la si grande musique européenne .
Après bien sûr sa si chère patrie : Venise !
Je les admire tous les trois .
Et Venise m'est , PLUS QUE JAMAIS , à fleur de peau .
Un artiste véritable ne meurt jamais , puisque , comme la mer infinie , il revient en permanence à sa source .
On s'est reconnu !
Ont été oubliés du reportage , Ezra Pound et Olga Rudge .
Faut que j'fouille dans les Cantos : j'les ai sous la main .
Devrait y avoir quelque chose .