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Gérard
Inscrit le : 18 Avr 2005 Messages: 1783 Localisation : Orléans
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Posté le : Mer 24 Fév 2010, 12:13:55 Sujet du message: |
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Exact , il voulait être Chateaubriand - voir la citation fameuse , peut-être d'ailleurs totalement inexacte - , et ne put jamais y parvenir !
Savez-vous donc pourquoi ?
C'est très simple : en 1947 , de Gaulle , cet immense écrivain inconnu - suffit de parcourir ses " Mémoires de guerre " , les faits , évènements et les portraits incomparables - , répond de manière admirable à cette interrogation hyper profonde :
"L'an dernier, j'ai relu lentement les Mémoires d'outre-tombe (...) C'est une oeuvre prodigieuse...Il pose sur l'avenir un regard profond...En fait, il avait presque tout vu...y compris les bolcheviks... et puis, je sens comme lui : essentiellement, voyez-vous, Chateaubriand est un désespéré...mais jusque dans son désespoir il fait face, il se redresse de toute sa taille".
Je rajouterais plus prosaïquement , " de toute sa faille " !
Avec Yvonne , ils lisaient trois livres par semaine en moyenne , se les commentaient , mais il est vrai , très lentement .
J'ai un faible , c'est exact , pour ce type de désespérés !
Hugo , lui , est un intrigant ; comme la divine marquise , il sent le vent ; c'est différent .
Il réhabilite , mine de rien , hélas , le siècle qui l'a précédé , et ce sous un masque de modernité qui aujourd'hui fait un consensus absolument inviolable dans tout l'pays , sous peine de flagellation , voire de pilori , ou de guillotine sortie de son emballage , sous papier graisseux .
C'est une faute de perspective immense .
Mais totalement invisible , la chute du Second Empire et la naissance de son contraire , la République , nécessitant un chantre , le trouva en l'exilé de Guernesey , droit dans ses bottes à marée haute .
La philosophie des Lumières , c'est d'abord et surtout les pamphlets , et peut-être seulement ça , ce nectar et ce fiel indissolubles : je retiens donc les " Lettres persanes " de Montesquieu , cet ouvrage exceptionnel , tout comme son auteur d'ailleurs , Bordelais comme Montaigne et Mauriac , paysans et vignerons , les fameux trois M ( Médoc , Margaux , Moulis, hummmmm que c'est bon ! ) , d'une modernité incroyable encore aujourd'hui puisqu'il disait à toutes fins utiles que la démocratie est fondée sur la vertu . A méditer !
Malraux s'en inspira dans la forme de l'écriture pour écrire en 1921 cet ouvrage hors pair , " La tentation de l'Occident " , dénonciateur de tout nihilisme , et annonciateur des grands troubles de la fin du 20ième , c'est à dire la décolonisation , et la chute définitive de notre Empire colonial dans sa globalité , tout comme la raillerie d'un moment fit chuter plus tôt un Roi de toujours . |
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Véra da POZZO

Inscrit le : 05 Déc 2005 Messages: 2190 Localisation : île de France
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Posté le : Mer 24 Fév 2010, 17:01:55 Sujet du message: |
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Gérard, dites-moi, en quoi Totor était un intrigant...
Alphonse lui plutôt oui.... non ?
De Gaulle, grand écrivain, c'est certain, mais les plus grand, quand même pas....
Qu'en pense les autres ? |
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Danielle

Inscrit le : 17 Avr 2005 Messages: 7935 Localisation : Montigny-le-Tilleul
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Posté le : Mer 24 Fév 2010, 17:15:46 Sujet du message: |
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moi je me dis que j'ai bien fait de "poster"....ces mémoires de Casanova..... :D :D :D :D :D :D :D ce qui me permet de suivre, comme je peux ...(. on a l'âge de ses neurones sinon le contraire ... :D :D :D :D sais plus ) les épanchements d'un Gérard "logorrhéique".. à souhait :D :D :D :D  |
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Gérard
Inscrit le : 18 Avr 2005 Messages: 1783 Localisation : Orléans
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Posté le : Mer 24 Fév 2010, 17:39:02 Sujet du message: |
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Hugo a retourné sa veste je ne sais combien de fois .
Il fut d'abord le supporter du premier Empire , puis celui de Charles X , et enfin arrivé au bout du voyage , de la République , sur le tard . Et peut-être que j'en oublie .
Au gré des évènements .
Et a formulé des prophéties , que je qualifierais d'extrêmement douteuses .
Mais tout cela , et on le vérifie chaque jour , n'est-il pas le propre de tous les politiciens ?
Et ce , dans ce cas , à l'opposé de celles de ceux des Lumières .
D'où ..... ma méfiance .
Napoléon III était plus socialiste que lui !!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!! C'est à peine croyable !
C'était un saint-simonien dans l'âme , dans l'action et dans la conversion !
La défaite de Sedan , la naissance de la 3ième Rep. , puis le marxisme triomphant , et enfin l'anarcho-syndicalisme , ont effacé des livres d'Histoire le rôle immense du neveu de Napo . Tout en grandissant de façon exponentielle et d'ordre quasi religieux celui du nouvel héraut .
Tam , ta , la , la !
Sonnez trompettes !
Et puis , je n'oublierai jamais , l'alliance si intime qui nous lie définitivement à notre chère Italie , car il fut de ceux avec Cavour , le grand Cavour , et Garibaldi , né à Nice , de ceux qui firent l'Italie de 1860 .
Alliance du libre-échange , du libéralisme , de l'expansion économique fulgurante des années 1850/1870 , avec le travail , et première tentative du bien-être ( relatif ) de la classe ouvrière , du peuple .
Vérifié par mes ancêtres , dont j'ai encore quelques témoignages bien utiles .
Danielle , je vous rassure , vos neurones ne défaillent nullement , d'autant plus que des scientifiques sérieux ( enfin , il en existe ! ) viennent de confirmer que le potentiel ne faiblit pas !
Ce dont , bien évidemment , secrètement face au politiquement correct envahissant et seul sur mon rocher battu par les flots du réchauffement climatique bidon , je me doutais . |
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Danielle

Inscrit le : 17 Avr 2005 Messages: 7935 Localisation : Montigny-le-Tilleul
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Posté le : Mer 24 Fév 2010, 18:32:14 Sujet du message: |
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[quote]le potentiel ne faiblit pas ! [code]
Gérard comme j'aimerais vous croire.... :D :D :D hélas, s'il ne faiblit....le potentiel rouille .. ou "vert de grise" c'est selon.........ma descendance me préconise des bains ..... d'une célèbre boisson bronzée.... :D :D :D :D :D :D bains de crâne évidemment....que pensiez-vous donc :wink: :D :D :D |
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Gérard
Inscrit le : 18 Avr 2005 Messages: 1783 Localisation : Orléans
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Posté le : Mer 24 Fév 2010, 18:38:43 Sujet du message: |
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Oui , mais sous la rouille , comme pour Casanova à Dux en ses Mémoires , l'éclat !
Et c'est bien ça qui compte .
Nuance !
D'ailleurs , mémoires , c'est un masculin pluriel . |
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Danielle

Inscrit le : 17 Avr 2005 Messages: 7935 Localisation : Montigny-le-Tilleul
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Posté le : Mer 24 Fév 2010, 18:55:28 Sujet du message: |
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MA ....RAM (mémoire à accès direct)...vient de déclencher...court circuit fatidique.. :D :D :D :D :D |
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babeth

Inscrit le : 28 Août 2009 Messages: 4989 Localisation : paris
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Posté le : Mer 24 Fév 2010, 20:34:44 Sujet du message: |
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Le XVIIIème, cette mondialisation avant l'heure des questionnements multiples par les esprits les plus brillants, mais tant d'ouverture retire de son pouvoir au clergé, fini l'enfer, merci Baron d'Holbach et merci les infâmes jouisseurs, Casanova en tête!!  |
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babeth

Inscrit le : 28 Août 2009 Messages: 4989 Localisation : paris
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Posté le : Mer 24 Fév 2010, 20:46:52 Sujet du message: |
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"mémoires" c'est masculin pluriel, mais "amours" c'est féminin pluriel, rebelotte Casanova, mais que Totor soit si vilipendé, je n'en crois pas mon ultime neurone.......  |
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Gérard
Inscrit le : 18 Avr 2005 Messages: 1783 Localisation : Orléans
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Posté le : Jeu 25 Fév 2010, 09:25:10 Sujet du message: Ah , Paris , Paris chéri , |
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Paris martyrisé ,
Paris outragé ,
Mais Totor vilipendé ,
Par son peuple ,
Et la France toute entière ,
C'est à dire la seule France , etc .... j'arrête là , ça m'agace , je fatigue .
" Faire l'éducation du genre humain, c'est la mission de l'Europe.
Chacun des peuples européens devra contribuer à cette sainte et grande œuvre dans la proportion de sa propre lumière [...] Tous ne sont pas propres à tout.
La France, par exemple, saura mal coloniser et n'y réussira qu'avec peine [...] Chose étrange à dire et bien vraie pourtant, ce qui manque à la France en Alger, c'est un peu de barbarie. Les Turcs allaient plus vite, plus sûrement et plus loin ; ils savaient mieux couper des têtes.
La première chose qui frappe le sauvage, ce n'est pas la raison, c'est la force.
Ce qui manque à la France, l'Angleterre l'a ; la Russie également.
[...] L'enseignement des peuples a deux degrés, la colonisation et la civilisation. L'Angleterre et la Russie coloniseront le monde barbare ; la France civilisera le monde colonisé. "
Décidément , le grand poète aura tout raté ! Et c'est bien pour cette raison qu'il avait un si grand talent .
Comme quoi .
Mais moi , je l'aurai pas loupé !
Surtout cette phrase : " La première chose qui frappe le sauvage, ce n'est pas la raison, c'est la force. "
Votre ultime neurone résistera-t-il encore longtemps ?
Consulter " Les chevaux du soleil " de Jules Roy , cette fresque remarquable et mélancolique d'un fils illégitime de gendarme de Rovigo , né dans la Mitidja , cette immense plaine fertile au sud d'Alger .
Sur l'enfer , je vous rassure , c'est bien la Révolution Française et personne d'autre qui , par son idéologie jusqu'au-boutiste , par ses crimes impensables d'inhumanité ( Terreur , massacres de Septembre , Vendée , Lyon , thuriféraires aux noms lugubres de Carnot , Turreau , Carrier , Fouquier-Tinville , etc ... ) en a ouvert la plus grande brèche pour qu'enfin on y voit s'agiter ces damnés !
Il y a une chose qui me réjouis sans vraiment me réjouir , c'est que Mozart , cet enfant sublime , et ce gigantesque cerveau , ne vit point tout ce déferlement .
Dernière édition : Gérard le Jeu 25 Fév 2010, 09:56:18; Edité 1 fois |
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Véra da POZZO

Inscrit le : 05 Déc 2005 Messages: 2190 Localisation : île de France
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Posté le : Jeu 25 Fév 2010, 09:52:55 Sujet du message: |
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Mais la question demeure, doit-on estimer le génie à l'aune des positions politiques "changeantes" de son auteur.
Je ne pense pas.
Totor avait 12 ans à la chute de Napoléon le Grand. Son père était général d'empire....
Et je trouve son parcours tout à son honneur de l'extrême droite -de l'époque-, à la gauche -de son époque-, souvent le trajet se fait dans l'autre sens.
Heureusement que l'expérience et les circonstances font évoluer un homme, surtout pour une vie qui court tout le long d'un siècle émaillé de rebondissements.
Gérard, avez vous les même idées que lorsque vout étiez adolescent ? J'espère que non pour vous.
Je pense que sous le 2e empire, il lui aurait été plus facile à tous points de vue de répondre à toutes les sollicitations et interventions pour revenir en France, où les plus grands honneurs lui étaient réservés....
Ce n'est pas qu'un poéte, il couvre tout le champ littéraire...
Certe son acharnement contre Louis-Napoléon (qu'il est temps aussi de réhabiliter, merci Ph. Seguin, cf "l'extinction du paupérisme") était un pari risqué mais réussi qui l'a aidé grandement pour l'édification de sa statue.
Ses contemporains de tous les bords ne s'y sont pas trompés. |
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Gérard
Inscrit le : 18 Avr 2005 Messages: 1783 Localisation : Orléans
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Posté le : Jeu 25 Fév 2010, 10:05:13 Sujet du message: |
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Vous voyez bien que j'ai gardé toute ma jeunesse .
Dans les postures .
On ne change pas si facilement que ça !
Voyez Giacomo !
Sur le Second Empire , le choix de Badinguet fut de virer tous les utopistes de 1848 ( Barbès , Ledru-Rollin and co ) qui étaient en train de vider les caisses publiques à la vitesse grand V .
" Voici la sortie , les gars , c'est pour vous , la porte est grande ouverte ! " Ils la prirent . Quelques noms fameux : le fils du général , Martin Nadaud , Baudelaire , etc ..... Je le soupçonne d'avoir voulu ainsi garantir nos postes-frontières , et ainsi éloigner les miasmes d'ailleurs beaucoup plus loin , plus loin encore comme un repoussoir . Echec total .
Il était temps !
Pour faire ceci !!!!!!!!!!!!!!!
Drôlatique , bien fait , rigolo , sympa ! Et les critiques aussi .
J'adore , d'autant plus que ça colle avec la réalité que j'ai connue .
Ce sont quand même mes vieux ancêtres qui ont posé les quais magnifiques d'ajustement de notre capitale hors classe . C'est vrai que je l'aime cette ville , où chaque jour naît un enfant-poète dans la cendre de Villon ! Intacte ! |
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Catherine C.

Inscrit le : 21 Déc 2006 Messages: 697 Localisation : Yvelines (78)
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Posté le : Jeu 25 Fév 2010, 19:44:05 Sujet du message: |
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TO avec toi, Vera...il est bien difficile de nier le génie de cet écrivain si complet qu'est Victor Hugo !! Que l'on soit ou non d'acord avec ses idées politiques parait, me semble-t-il, de peu d'importance par rapport à son oeuvre littéraire qui le classe dans les écrivains de langue française les plus importants !!
Mais bien sûr, Gérard, je ne fais là qu'exprimer mon avis personnel :wink: :wink: :wink: |
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Vecellio

Inscrit le : 09 Mars 2006 Messages: 769 Localisation : Trop loin de la Lagune!...
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Posté le : Ven 26 Fév 2010, 00:17:00 Sujet du message: |
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"S'il n'en reste qu'un, je serais celui-là" |
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Gérard
Inscrit le : 18 Avr 2005 Messages: 1783 Localisation : Orléans
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Posté le : Ven 26 Fév 2010, 09:47:32 Sujet du message: Très juste ! |
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Et c'est un Sétois hors pair , qui finalement a rendu au grand poète quelque chose comme un chant d'Eglise , une sorte de contine templière enchantée , rivée cette fois aux cristaux bleus de Chartres !
Une vraie magnificence populaire .
Grandiose !
Venez, vous dont l’œil étincelle,
Pour entendre une histoire encor,
Approchez : je vous dirai celle
De doña Padilla del Flor.
Elle était d’Alanje, où s’entassent
Les collines et les halliers.
- Enfants, voici des bœufs qui passent,
Cachez vos rouges tabliers !
Il est des filles à Grenade,
Il en est à Séville aussi,
Qui, pour la moindre sérénade,
À l’amour demandent merci ;
Il en est que d’abord embrassent,
Le soir, de hardis cavaliers.
- Enfants, voici des bœufs qui passent,
Cachez vos rouges tabliers !
Ce n’est pas sur ce ton frivole
Qu’il faut parler de Padilla,
Car jamais prunelle espagnole
D’un feu plus chaste ne brilla ;
Elle fuyait ceux qui pourchassent
Les filles sous les peupliers.
- Enfants, voici des bœufs qui passent,
Cachez vos rouges tabliers !
Rien ne touchait ce cœur farouche,
Ni doux soins, ni propos joyeux ;
Pour un mot d’une belle bouche,
Pour un signe de deux beaux yeux,
On sait qu’il n’est rien que ne fassent
Les seigneurs et les bacheliers.
- Enfants, voici des bœufs qui passent,
Cachez vos rouges tabliers !
Elle prit le voile à Tolède,
Au grand soupir des gens du lieu,
Comme si, quand on n’est pas laide,
On avait droit d’épouser Dieu.
Peu s’en fallut que ne pleurassent
Les soudards et les écoliers.
- Enfants, voici des bœufs qui passent,
Cachez vos rouges tabliers !
Mais elle disait : « Loin du monde,
Vivre et prier pour les méchants !
Quel bonheur ! quelle paix profonde
Dans la prière et dans les chants !
Là, si les démons nous menacent,
Les anges sont nos boucliers ! »
- Enfants, voici des bœufs qui passent,
Cachez vos rouges tabliers !
Or, la belle à peine cloîtrée,
Amour en son cœur s’installa.
Un fier brigand de la contrée
Vint alors et dit : Me voilà !
Quelquefois les brigands surpassent
En audace les chevaliers.
- Enfants, voici des bœufs qui passent,
Cachez vos rouges tabliers !
Il était laid : les traits austères,
La main plus rude que le gant ;
Mais l’amour a bien des mystères,
Et la nonne aima le brigand.
On voit des biches qui remplacent
Leurs beaux cerfs par des sangliers.
- Enfants, voici des bœufs qui passent,
Cachez vos rouges tabliers !
Pour franchir la sainte limite,
Pour approcher du saint couvent,
Souvent le brigand d’un ermite
Prenait le cilice et souvent
La cotte de maille où s’enchâssent
Les croix noires des Templiers.
- Enfants, voici des bœufs qui passent,
Cachez vos rouges tabliers !
La nonne osa, dit la chronique,
Au brigand par l’enfer conduit,
Aux pieds de sainte Véronique
Donner un rendez-vous la nuit,
À l’heure où les corbeaux croassent,
Volant dans l’ombre par milliers.
- Enfants, voici des bœufs qui passent,
Cachez vos rouges tabliers !
Padilla voulait, anathème !
Oubliant sa vie en un jour,
Se livrer, dans l’église même,
Sainte à l’enfer, vierge à l’amour,
Jusqu’à l’heure pâle où s’effacent
Les cierges sur les chandeliers.
- Enfants, voici des bœufs qui passent,
Cachez vos rouges tabliers !
Or quand, dans la nef descendue,
La nonne appela le bandit,
Au lieu de la voix attendue,
C’est la foudre qui répondit.
Dieu voulu que ses coups frappassent
Les amants par Satan liés.
- Enfants, voici des bœufs qui passent,
Cachez vos rouges tabliers !
Aujourd’hui, des fureurs divines
Le pâtre enflammant ses récits,
Vous montre au penchant des ravines
Quelques tronçons de murs noircis,
Deux clochers que les ans crevassent,
Dont l’abri tuerait ses béliers.
- Enfants, voici des bœufs qui passent,
Cachez vos rouges tabliers !
Quand la nuit, du cloître gothique
Brunissant les portails béants,
Change à l’horizon fantastique
Les deux clochers en deux géants ;
À l’heure où les corbeaux croassent,
Volant dans l’ombre par milliers...
- Enfants, voici des bœufs qui passent,
Cachez vos rouges tabliers !
Une nonne, avec une lampe,
Sort d’une cellule à minuit ;
Le long des murs le spectre rampe,
Un autre fantôme le suit ;
Des chaînes sur leurs pieds s’amassent,
De lourds carcans sont leurs colliers.
- Enfants, voici des bœufs qui passent,
Cachez vos rouges tabliers !
La lampe vient, s’éclipse, brille,
Sous les arceaux court se cacher,
Puis tremble derrière une grille,
Puis scintille au bout d’un clocher ;
Et ses rayons dans l’ombre tracent
Des fantômes multipliés.
- Enfants, voici des bœufs qui passent,
Cachez vos rouges tabliers !
Les deux spectres qu’un feu dévore,
Traînant leur suaire en lambeaux,
Se cherchent pour s’unir encore,
En trébuchant sur des tombeaux ;
Leurs pas aveugles s’embarrassent
Dans les marches des escaliers.
- Enfants, voici des bœufs qui passent,
Cachez vos rouges tabliers !
Mais ce sont des escaliers fées,
Qui sous eux s’embrouillent toujours ;
L’un est aux caves étouffées,
Quand l’autre marche au front des tours ;
Sous leurs pieds, sans fin se déplacent
Les étages et les paliers.
- Enfants, voici des bœufs qui passent,
Cachez vos rouges tabliers !
Élevant leurs voix sépulcrales,
Se cherchant les bras étendus,
Ils vont... Les magiques spirales
Mêlent leurs pas toujours perdus ;
Ils s’épuisent et se harassent
En détours, sans cesse oubliés.
- Enfants, voici des bœufs qui passent,
Cachez vos rouges tabliers !
La pluie alors, à larges gouttes,
Bat les vitraux frêles et froids ;
Le vent siffle aux brèches des voûtes ;
Une plainte sort des beffrois ;
On entend des soupirs qui glacent,
Des rires d’esprits familiers.
- Enfants, voici des bœufs qui passent,
Cachez vos rouges tabliers !
Une voix faible, une voix haute,
Disent : « Quand finiront les jours ?
Ah ! nous souffrons par notre faute ;
Mais l’éternité, c’est toujours !
Là, les mains des heures se lassent
À retourner les sabliers... »
- Enfants, voici des bœufs qui passent,
Cachez vos rouges tabliers !
L’enfer, hélas ! ne peut s’éteindre.
Toutes les nuits, dans ce manoir,
Se cherchent sans jamais s’atteindre
Une ombre blanche, un spectre noir,
Jusqu’à l’heure pâle où s’effacent
Les cierges sur les chandeliers.
- Enfants, voici des bœufs qui passent,
Cachez vos rouges tabliers !
Si, tremblant à ces bruits étranges,
Quelque nocturne voyageur,
En se signant demande aux anges
Sur qui sévit le Dieu vengeur,
Des serpents de feu qui s’enlacent
Tracent deux noms sur les piliers.
- Enfants, voici des bœufs qui passent,
Cachez vos rouges tabliers !
Cette histoire de la novice,
Saint Ildefonse, abbé, voulut
Qu’afin de préserver du vice
Les vierges qui font leur salut,
Les prieures la racontassent
Dans tous les couvents réguliers.
- Enfants, voici des bœufs qui passent,
Cachez vos rouges tabliers !
Avril 1828
Eh bien voyez-vous , c'est à ce moment , au coeur de l'élévation divine , mais à ce moment seulement , qu'il devient mon frère de foi .
Mais à ce moment seulement ! |
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